Ce cédérom sans texte ni commentaire, dépourvu d'une visée éducative telle qu'on l'entend habituellement, suscite le jeu avec vingt-six lettres en liberté; il surprend, il émeut, il éveille : c'est là tout son enseignement ! Il s'agit d'une vision poétique, d'une vision de peintre à qui fut accordé le mouvement et une forte dose d'aléatoire, conférant à ces lettres quelque chose qui ressemble à la vie. Le spectateur-acteur utilise le clavier, la souris ou le microphone de l'ordinateur pour convier les lettres qui chacune ouvre sur un atelier : il s'agit ici d'un collage musical à multiples figures, là d'un pliage en trois dimensions, ailleurs d'un mobile agité par un souffle virtuel… Le O danse au son du micro, le S frissonne quand on lui parle, le P se déplie en formes vraiment étranges. Aucun menu ne vient perturber la chorégraphie, aucun rappel à l'ordre informatique, et pourtant les coulisses du cédérom regorgent d'algorithmes utilisant les lois de la physique – gravitation, frottement, élasticité pour mimer le monde réel ou le sublimer. De la même façon, l'univers sonore est à la fois génératif et interactif, renouvelant à chaque découverte les possibilités de jeux. Et le plus surprenant, c'est sans doute que cette énorme machinerie débouche sur autant de simplicité, de facilité, d'évidence et de rêve! Alphabet, d'après le livre de Kveta Pacovskà, un cédérom créé par Murielle Lefèvre, Frédéric Durieu, Jean-Jacques Birgé et édité en France, en première mondiale, par Syrinx.